24 janvier 2008

La Fosse 4 de Carvin (Pas-de-Calais)

Je me souviens de mon enfance entre douze et quatorze ans quand on s’attardait souvent le soir dans la cité jusqu’aux alentours de vingt-deux heures. A deux, puis trois, puis six… Tous les gamins du coron se réunissaient. Une chose est sûre : il y avait un respect. Notamment celui dû aux ouvriers et aux anciens, souvent retraités des mines, des « bâtisseurs de montagnes » qu’on appelle les terrils. Pas besoin de téléphone pour se contacter dans le quartier. On allait au portillon devant la maison et on criait, on hurlait presque : « Karim !!! » plus loin, « Marc !!! ». On insistait en prolongeant les syllabes du prénom pour qu’il soit audible. Parfois, le camarade sortait aussitôt, enfilait sa veste en courant pour nous rejoindre, tandis que certain ouvrait la fenêtre de leur chambre à l’étage :
- Je ne sors pas. Je dois terminer mes devoirs !
- Vas-y viens sérieux !
- Nan j’peux pas ! Mon père va m’engueuler si je sors encore ce soir.
- Tant pis bouffon ! A d’main !
On enfourchait notre vélo pour trainer dans les rues et les voyettes. Je me souviens du « jeux de la mort » : Nous étions sur un parking au cœur d’une cité minière, la cité du Marais plus précisément dans le quartier de la Fosse 4 à Carvin. Nous roulions n’importe comment, dans toutes les directions, dans l’unique but de faire tomber celui qu’on croisait… Un jeu dangereux me diriez-vous mais tellement excitant !

Toujours à « Fosse 4 » mais plus près du Contour de Buqueux, j’avais l’habitude de passer mes vacances scolaires avec trois copains. Nous passions des journées complètes ensemble. Ces trois copains qui étaient aussi trois frères, habitaient la maison voisine à côté de chez mes grands-parents. Nos chambres étaient au même niveau. Le premier qui se réveillait le matin avait comme consigne de réveiller le voisin en tambourinant dans le mur mitoyen. On savait ainsi qu’une demi-heure plus tard, il était l’heure de prendre tout notre bric-à-brac : sécateur, tournevis, scie, clous, marteau… Le nécessaire pour fabriquer… la cabane !

C’était dans le bois d’Ennecourt, un petit bois entre les champs et les maisons, qui jadis fût traversé par une ligne de chemin de fer. Un chemin permettait d’aller du Contour de Buqueux jusqu’aux maisons de l’entrée du bois non loin de la route de Libercourt. Je me souviens de la brume le matin qui humidifiait mes vêtements. Je me souviens de l’odeur des champs et des fleurs. Je me souviens de la fraicheur de la rosée. Je me souviens des bruits de la nature, du chant des oiseaux, du bruissement des feuilles. Je me souviens aussi des heures passées à construire des cabanes, à les démolir ensuite pour recommencer encore et encore… Tôles, vieux canapés, caisses en plastique, palettes, carcasses de voitures… nous trouvions tout sur place… et vraiment n’importe quoi. Mon grand-père remontait le chemin peu avant midi… Je savais qu’il était l’heure pour nous d’aller déjeuner.

Comme le disait souvent mes grands-parents : « T’as core mingé al’fronde ! », une manière de dire que j’ai mangé trop vite… pour retourner dans le bois ! Pas de temps à perdre ! Les vacances sont courtes, il faut en profiter !

L’après-midi, pour savoir s’il était l’heure de rentrer, on se fiait plus souvent aux signes de la nature ou simplement aux gargouillements de notre ventre… un signe qui ne trompe pas… il ne s’agit pas de dire que l’appétit vient en jouant car nous serions peut-être morts de faim !

Malheureusement, depuis quelques années, ce bois a disparu, laissant derrière lui d’innombrables souvenirs… Un trafic de véhicules toujours croissant, des restrictions de tonnages… il était devenu temps de leur faire contourner la ville...

« Dans ce bois, un homme se promenait tous les jours. Il arpentait le chemin lentement, les mains dans le dos, tête baissée. Il était coiffé d'une casquette grise et portait une salopette tantôt verte, tantôt bleue. Pensif, nostalgique, à quoi songeait-il ? Il était simplement heureux ». Cet homme s’appelait René. C’était mon Grand-père…

23 janvier 2008

De la découverte du charbon... à la fin de son extraction en 1990


Le 21 décembre 1990, la dernière gaillette est remontée à la fosse 9 - 9 bis à Oignies, tournant définitivement la page de l’épopée de l’extraction du charbon dans le Bassin Minier du Nord - Pas-de-Calais. Cette époque industrielle, nous la devons à l’Ingénieur Mulot, qui découvre du charbon lors du forage d’un puits artésien dans le parc du Château de Madame De Clercq, née Henriette Crombez. Cette bienfaitrice de Oignies souhaita alimenter ses étangs en eau… elle alimentera la France en charbon ! Une aubaine pour notre région. Louis-Georges Mulot (1792-1872) était un entrepreneur de puits artésiens devenu célèbre par le percement en 1840, du puits de Grenelle à Paris dans le 15ème arrondissement (http://www.ile-de-france.drire.gouv.fr/ssol/albien/grenelle.htm).

Qu’est-ce qu’un puits artésien me demanderez-vous ? Etymologiquement, « Artésien » signifie « propre à l’Artois ». C’est un puits où l’eau jaillit spontanément. C’est en 1126 que les moines de l’Abbaye de Lillers ont su le mettre en évidence. Dans le cas présent, il s’agit d’un puits foré dans une nappe captive sous pression, de laquelle s’élève naturellement l’eau jusqu’au sol mais n’est pas jaillissante.

La Voix du Nord : Brèves de la Région Nord Pas-de-Calais